Parce que bien entendu, même si je suis anorexique (c'est toujours relativement énervant à écrire, bordel...), il y a des périodes où je vais craquer.
Sauf qu'un craquage, pour moi, ce n'est pas la même chose que pour vous.

Vous, vous dites que vous faites un excès quand vous mangez un gâteau, des bonbons ou un plat trop calorique.

Moi, mon craquage, ça consiste en une vraie orgie de nourriture.

Parce que bon, j'ai beau faire la fière, la belle, celle qui ne souffre pas des restrictions qu'elle s'impose, c'est bien sûr du pipeau.
Y'a des jours où je vais très bien supporter de ne pas me nourrir ou alors de m'alimenter très peu, juste parce que ça va être, dans ma tête et pour ma maladie, une nouvelle victoire sur mon ancienne obésité.

Et puis y'a les moments, où, je ne sais pas pourquoi, mais je vais avoir envie de BOUFFER. Soyons clairs, ce n'est pas une envie de manger, ou quoi, c'est vraiment bouffer.
Je vais descendre dans ma cuisine, et manger tout ce que je peux, sans aucun plaisir. Juste comme ça. C'est une pulsion. Je vais avoir envie de manger des pâtes, je vais me faire des pâtes, mais impatiente de vouloir soulager ce besoin, je vais aller fouiller dans le frigo, dans le placard pour dénicher un truc à manger en attendant que l'eau boue. 
Et tout peut y passer, dans n'importe quel ordre et surtout, dans une quantité démesurée...
Les pâtes, les chips, les gâteaux, les yaourts, les fruits, les céréales, tout, tout et tout et surtout n'importe quoi.

Quand je suis comme ça, j'ai des rituels. En fait, à partir du moment où s'installent les TCA, on devient une personne avec des TOC, des manies, des choses qu'il ne faut pas bousculer.

Par exemple, quand je crise, il faut que ce soit devant Kaamelott. Pourquoi, j'en sais rien. Mais il faut. Ensuite, même si "je perds le contrôle", j'essaye quand même de le faire avec une certaine logique : ne manger que des aliments faciles à  "rendre", et éviter tout de même les plus caloriques. L'anorexie me surveille, même en pleine crise de boulimie... Bah oui. 


Je vais manger, manger, m'empiffrer jusqu'à n'en plus pouvoir, pour ensuite regretter d'avoir mangé autant, et vous connaissez la suite : j'irai aux toilettes, je rendrais ce que j'ai englouti (du moins la plus grande partie), et je remonterais pour continuer le train-train quotidien.

Sauf qu'après ça, je me sens comme une merde.
J'me sens vide, et bien entendu soulagée d'avoir recraché tout ça, mais je me sens pire que jamais.

Et après une crise, j'peux vous dire qu'on a qu'une envie : c'est pleurer, se demander pourquoi, pourquoi il faut que ça se passe comme ça, pourquoi est-ce qu'il faut que je mange autant, pourquoi même quand j'en avale une quantité aussi impressionnante, je n'éprouve aucun plaisir alors que ce sont sensés être des aliments que j'aime, pourquoi je fais ça,

Pourquoi pourquoi pourquoi... 

Ces crises m'anéantissent. Parce que ça veut dire que je perds carrément tout contrôle de moi, que la maladie à prit REELLEMENT le dessus sur ma personne, et que je ne suis maîtresse de rien.

C'est con  à dire, mais c'est comme ça.


J'en ai marre de cette maladie.

Et j'en ai marre des crises.

Comme je l'ai expliqué au début, je me disais qu'en écrivant, d'un, ça me ferait du bien de pouvoir parler de ça à quelqu'un, car mine de rien, c'est comme un secret trop lourd pour mes épaules, j'ai besoin de me vider, de me soulager, de mettre des mots sur ces troubles qui me tuent à petit feu.
Donc, oui, je pense que ce blog a une fonction de journal intime, c'est sûr. De plus les détails que je donne sont vraiment.. Personnels.

Mais c'est aussi un appel à l'aide. J'essaye de faire comprendre, peut-être maladroitement, que j'ai besoin d'aide et que j'aimerais surtout avoir des gens avec qui parler. Car je me sens affreusement seule et la solitude me mène à mes troubles qui me mènent à ma perte.

Oui, je sais, je dis que je veux mincir, mais quand je parle ainsi, ce n'est pas en faisant une apologie de ma maladie (non, car je déplore celles qui font ça, qui gâchent leur vie avec cette pourriture), quand je dis ça, c'est pas moi qui parle, mais la petite voix dans ma tête.

Je sais que pour beaucoup de gens qui méconnaissent cette maladie car il ne l'ont pas vécue (et j'en suis très heureuse pour eux) cela reste difficile à comprendre, voire à imaginer, pourtant c'est ça : je ne suis pas seule dans ma tête.

Oui, c'est un trouble psychologique, oui oui j'en suis consciente, mais je ne peux pas chasser cette voix simplement par la volonté. ah ça serait bien trop simple...

Donc, oui, c'est aussi un appel à l'aide.

Vous lire, vos commentaires, même si ils ne vous coûtent que 3 minutes dans la journée, me font plaisir. C'est con, mais c'est comme ça. Car je me dis que quelqu'un m'a lue, quelqu'un s'est donné la peine de me répondre, quelqu'un m'a remarquée, non, je ne suis plus invisible, j'existe encore, et j'existe pour autre chose que pour l'anorexie.

Car bon qu'on se le dise, dans ma vie, actuellement, la seule chose qui prédomine et qui me caractérise, c'est cette foutue conne. Et oui...

Mais dans tout ça, après toutes ces "révélations", j'ai quand même une bonne nouvelle :

J'ai mangé et j'ai gardé mon repas, 2 fois de suite cette semaine. Ce soir, j'étais invitée chez maman et j'ai mangé 4 asperges, une tranche de jambon grillée et un yaourt aromatisé.

Et je l'ai gardé.


Pour certain cela va paraître ridicule, léger, insuffisant, mais vous n'imaginez pas comme pour moi c'est énorme ! C'est une petite dose d'espoir.

L'espoir qu'un jour, tout cela se termine !

Et que cet S.O.S se transforme en période terminée, en un exemple pour les filles malades, pour celles qui se battent en même temps que moi, pour celles qui luttent contre cette garce qui est l'anorexie.


Pour fêter ça, je mets une photo de moi avec une nouvelle robe que j'adore. Et on ne se moque pas de moi parce que je bombe le torse hein.. j'essayais seulement de faire comme si j'avais de la poitrine, haha.

Profitez, c'est un fait exceptionnel : Ce genre de photo, vous ne risquez pas d'en revoir... à immortaliser pour la postérité !




 

Pour ne pas qu'on remarque que j'ai trop maigri, par exemple, parce que je ne veux pas me prendre dans la tête les reproches et les méfaits de l'anorexie.
Merci, mais je les connais déjà, hein.

Ma technique, c'est que je garde mes vêtements trop grands. Je porte une taille (voire deux) de plus. Donc, au lieu de mettre du 34, je mets du 36 ou même du 38.

Bien sûr, c'est ridicule, je nage dedans, mais au moins on ne peut pas réellement distinguer les soucis.

Cette technique, je l'utilise surtout au travail ou quand je vais chez ma mère, histoire de limiter les dégâts.

Car moi, bien sur, je ne me trouve pas trop mince...

Sauf maintenant. Sur ces photos. Car.. Voici ce que ça donne avec la triche :




Et voilà ce que ça donne, quand on essaye de mettre les vêtements plus prêt du corps....






Au final, je crois que ce truc de triche a même agi sur mon propre cerveau : Moi, je me vois constamment comme l'image d'en haut, alors qu'en réalité je suis celle d'en bas. C'est un truc de fou, ce truc, comment ça peut bouffer une personne.

Je me vois potelée, voire normale, pas trop mince, ni trop grosse (enfin... si, ça m'arrive).

Alors qu'en fait, qu'en je regarde ce à quoi je ressemble, en bas, je me dis que j'suis horriblement mince... Mais mon cerveau décide de lui-même de me voir comme celle d'en haut.

C'est trop dur, de faire la part des choses.

Pour les gens extérieurs, ceux qui ne sont pas ou ceux qui n'ont jamais été atteints (et ils ont bien de la chance) de TCA, ça paraît tout bête.

Il faut manger! Se forcer! C'est simple non?

Si seulement ça l'était. Si c'était si simple, je n'aurais pas été encore une fois aux urgences mardi. J'ai encore maigri. Trop. Je ne tenais plus debout, n'arrivait plus à me soutenir et à me porter. Mes os me faisaient trop mal. Je voyais trouble. 

Résultat ; Je suis en arrêt de travail.

Et hier, pour la première fois depuis très longtemps, j'ai mangé un repas sans le vomir. Jambon grillé/Tarte aux pommes.

Pour beaucoup ce n'est rien, pour moi, c'est l'Everest.

Mais aujourd'hui, je m'en suis voulu, j'ai culpabilisé. Du coup, je n'ai pas eu de repas normal. Putain de maladie.


En attendant de surmonter tout ça, de réussir à m'en sortir, je me dis que finalement, je vais continuer de tricher...

Juste pour ne pas effrayer les autres (et moi).