x-Ael-x

De l'autre coté de la porte

Dimanche 5 mai 2013 à 19:16

Plus rien ne me fait envie.

Je mange des crudités tous les soirs, et ce soir, je n'en peux plus, je ne veux pas manger ça.

Je ne veux rien, même si j'ai faim, rien ne me donne envie de "soulager" cette sensation, rien ne vaut la peine à ce que je risque de prendre du poids.

Cette vision horrible dans ma tête de moi, avec mes bourrelets, avec mon gras, avec les insultes et les moqueries, elle me hante chaque fois que je porte un  aliment à ma bouche.

Je suis tellement usée aujourd'hui. C'est un combat permanent, entre l'anorexie et moi, et au final, je commence à avoir peur, mais vraiment peur.

Parce que je ne suis pas sûre de pouvoir gagner cette bataille, parce que cette conne est plus forte que moi, je le sais.


J'ai vraiment peur de ne plus pouvoir avaler un seul repas normalement, de ne plus éprouver aucun plaisir en mangeant, de n'y voir qu'une torture.

J'ai peur de me lever chaque jour de plus en plus mal en point, en aillant un peu plus mal au corps, un peu plus de fatigue qui s'accumule, tout ça en même temps que je perds du poids.

Je regarde ma main droite, celle dont je me sers pour rendre, et je vois déjà les marques de l'anorexie sur elle; mes dents  qui percent la peau quand j'essaye désespérément de rendre le trop-plein.

Et j'ai peur.


Peur de crever à cause de maladie de merde.



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Et derrière tout ça, il y a cette satisfaction, cette grande sensation de victoire quand je me dis "Je rentre dans une taille 34"...


Jeudi 2 mai 2013 à 19:45

 Je suis révoltée, énervée, fatiguée, usée, désespérée, blessée... à bout.

Il y a des jours où je peux le surmonter, où je peux vivre avec la maladie, même si je sais qu'elle est là, qu'elle ne me laisse pas en paix, j'avance, je fais ce qu'on attend de moi, j'agis comme si j'étais presque.. Naturelle.

Et puis il y a des moments où, comme ce soir, je n'en peux plus, trop c'est trop.

J'ai mal aux côtes, j'ai l'impression de les entendre craquer à chaque pas. Je sens mon ventre bouger au rythme de mon coeur. Marcher m'épuise, j'ai l'impression que je vais tomber toutes les 10 secondes
. On me demande de faire certaines choses, et je les fais sans me plaindre, alors que tout ce que j'aimerais faire c'est aller me coucher, dormir, oh oui dormir et oublier. 

Je suis allée faire un tour à la librairie, aujourd'hui. Je voulais me trouver un peu de lecture, car je ne regarde pas souvent la télé. Et puis j'ai regardé les magasines féminins. Et putain, ça m'a sauté aux yeux : 
"Mincir avant l'été, la recette miracle !"
"Liste de tous les coupe-faims"
"Le régime, mieux que Dukan !"
"Perdre du poids efficacement"
"Se préparer pour le maillot de bain"...
Et j'en passe et des meilleurs. Et après ils s'étonnent que tant de gens tombent dans les TCA ? Mais quel est ce besoin de rendre les gens minces? Oui, l'obésité est un fléau, mais et la maigreur? Et la malnutrition? Et les maladies psychologiques qui en ressortent?

Je me suis arrêtée devant ces magasines. Je n'en ai pas vu un seul traitant des soucis liés aux TCA. Personne qui ne parle de ces maladies, pourtant fréquentes, comment les éviter, comment s'en sortir, comment ne pas sombrer. Et j'ai trouvé ça écoeurant.

Je suis sortie de la librairie sans rien acheter, sans même dire au revoir, dégoûtée, révulsée par cette mode à la petite taille.

Et on ose encore me demander pourquoi je fais ça ? Comment j'ai bien pu en arriver là ? Moi, cette question, je ne me la pose plus...

Ce que j'aimerais savoir, c'est comment m'en sortir !

En rentrant, j'ai pas pu, pas pu continuer, pas pu faire comme si tout allait bien, mon chat miaulait, il voulait manger, et moi j'voulais qu'on me laisse tranquille, je voulais tout envoyer valser, vider mes placards à la poubelle, tout casser, et ce que j'ai fais, bah c'est m'étaler dans la cuisine pour pleurer.

Pleurer en pensant à demain, en me demandant comment j'allais supporter cette journée de travail, comment j'allais faire pour pouvoir tenir la cadence, car même si mon travail n'est pas physique, il faut quand même être dynamique, souriante, mais comment faire alors que je n'en peux plus, que je suis usée, épuisée, que tout ce que je veux c'est disparaître? Alors je pleure encore et encore, en priant pour que la nuit soit longue et que demain soit loin, et surtout, surtout, je pleure en me disant que j'aimerais enfin être libérée de tout ça.

 

Mais je sais, encore une fois, que ça ne durera pas, et que ce soir, mes rituels reviendront.... Putain de cercle vicieux. J'en peux plus.

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Mercredi 1er mai 2013 à 22:37

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Avec les TCA (troubles du comportement alimentaires, pour ceux qui l'ignorent), le truc, c'est qu'il y a des épreuves tous les jours.
Mais le pire, c'est quand on doit manger devant quelqu'un. Devant les collègues de travail, devant la famille, devant des amis...
Et là, c'est la descente aux enfers.

Déjà que manger c'est une corvée (enfin, je parle surtout pour mon cas, là), alors quand quelqu'un assiste à ma "punition" comme je l'appelle, c'est l'horreur. En semaine, je dois garder la face et manger "normalement" devant mes collègues de travail. Parfois, ils s'étonnent que je mange si peu, et quelques fois, ils ne disent rien. En général, pour faire bonne figure, je mange une salade composée et un dessert bien calorique. Parce que ça donne le change. Et parce que surtout, c'est facile à vomir. Surtout quand on boit beaucoup durant le repas.

C'est un truc que j'ai appris. Beaucoup boire quand on mange, car ça facilite le "rendu". C'est horrible ce que je dis, je sais. Mais c'est comme ça. Tous les jours, dans ma tête, j'imagine des techniques de folies pour ne pas avoir à manger, ou alors, si je dois manger, manger peu et ne pas le garder.

Donc manger tranquillement devant les collègues, parler de tout et de rien, faire comme si tout était normal. Ne pas montrer que je suis fatiguée, ni écoeurée par ce que je mange. Attendre qu'ils partent fumer, ou aillent ailleurs, pour aller aux toilettes. Prendre mon temps. Tirer la chasse d'eau pour cacher les bruits. Faire vite. Rendre. Re tirer la chasse d'eau. Vérifier que personne n'est entré dans les toilettes. Rendre. Tirer la chasse d'eau. Sortir des toilettes, se laver les mains, se nettoyer le visage, prendre un chewing gum ou un bonbon pour cacher les odeurs, se remaquiller, et sortir comme si de rien n'était.

Je peux vous dire que c'est usant. Et maintenant, j'en viens même à me moquer qu'on m'entende ou pas. Je n'en peux plus. Je suis usée de me cacher, j'veux juste qu'on me laisse dans mon coin, avec mes rituels, ma bouffe, mes trucs dégueux.

Au boulot, ça va encore, j'arrive à le gérer.
Et quand je vais au restaurant, c'est pareil, j'ai toujours une technique pour m'éclipser aux toilettes, et même quand c'est un peu long, on ne s'étonne pas, je suis une fille coquette, c'est normal que je prenne du temps. Par contre, quelques fois, je ressors les yeux rouges, c'est pas grave, j'attends encore un peu avant de retourner à table, et ça le fait.

Mon cauchemar personnel, à moi, c'est les repas chez ma mère.
Car ma mère sait que je suis malade. Sauf qu'elle ne sait pas comment le gérer. Alors, quand je mange là-bas, elle a tendance à remplir mon assiette.
"-Prend un oeuf, ma chérie. Et puis prend un peu plus de carottes, ça fait pas grossir, c'est que des légumes hein. Prend des tomates aussi. Et puis des concombres. Prend un peu de poisson, du riz. Tiens, je te mets un peu de ratatouille. Tiens, prends un yaourt. Prend une banane."

Pour elle, ce n'est rien, elle me sert des petites quantités. Seulement pour moi, c'est une montagne de nourriture. Pour moi, c'est trop. C'est comme si j'étais invitée à un mariage et que je mangeais pour 100. Oui, j'exagère peut-être pour vous, mais pour moi je vous assure, c'est bien trop.
Mais je mange, je n'ai pas le choix, elle me lance ce regard qui dit "tu peux bien manger ça, tu es toute maigre, ne discute pas."
Bien sûr, je pourrais très bien manger et aller me faire vomir par la suite, mais non... Bah ça serait trop simple...

Non, car les repas chez ma mère, ça dure souvent une éternité. Et comme elle sait que je me fais vomir, je peux tout simplement pas aller aux toilettes et y rester plus de 3minutes, sinon ça parait tout de suite suspect. Et comme par hasard, ces soirs-là, faut qu'on discute de tout et de rien, comme par hasard, l'éternité s'écoute et quand je rentre, je sais qu'il est déjà trop tard,que j'aurais déjà digéré. J'aurais beau m'efforcer à tout rendre, je ne le pourrais pas.

Alors je vais avoir mal au ventre toute la nuit, culpabiliser, et le lendemain, je ne mangerai pas.


Je hais les repas en famille. Je hais manger en public. Je déteste manger.


Mais plus que tout, je déteste cette maladie qui rend chaque sortie infernale.


Je n'en peux plus de tout ça.



Article écrit car ce soir, j'ai mangé chez ma mère, mais bon, j'ai évité de justesse la soirée interminable, tout le monde était fatigué. J'ai pu rentrer "à temps". Je me trouve horrible d'écrire ceci, je ne devrais pas penser comme ça, mais pourtant, je suis rassurée, j'ai pu rendre et ainsi, ne pas me sentir lourde.

D'ailleurs, à cette soirée, je me suis pesée, et j'ai constaté que j'avais perdu 1kg supplémentaire. Maintenant, je fais officiellement 43kg. Et ma mère m'a officiellement balancé un "ne continue pas ainsi Léa, ça ne le fera pas.". Elle est en colère, elle s'inquiète, et je crois que le livre qu'elle a lu n'a pas remédié à ses troubles ("Ce matin j'ai arrêté de manger", de Justine).

Je suis à 95% heureuse de ce nouveau kilo perdu. C'est une victoire, car chaque fois que je peux perdre, c'est quelque chose qui me rapproche, dans ma tête, du parfait. Et à 5% je pense qu'il faut que j'arrête, que je frise la bétise, que je dois me remettre dans le droit chemin, qu'il faut que je me fasse soigner.

Mais dans la balance, les 5% sont bien trop faibles, et je sais que demain, la journée sera identique à celle-ci.

Je vais me lever, prendre mes céréales, les manger, et pendant le reste de la journée, je vais lutter contre la fatigue, l'envie de tomber dans les pommes, boire de l'eau, manger un gateau et me dire que "vu le sucre qu'il y a là dedans, je peux tenir jusqu'à demain", et voilà, c'est tout.

Qu'est-ce que je peux être stupide. Quelle maladie à la con.

 

 

 

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